
Comment définir le (juste) prix d’acquisition d’une société?
Valoriser une entreprise dépasse la simple évaluation financière. Les tendances de marché, les perspectives et les conditions même de chaque fusion jouent un rôle clé.
Multiple de l’EBITDA*, Ratio sur le chiffre d’affaires, de la croissance… il existe un très grand nombre de méthodes pour essayer de valoriser une société. Aucune formule ne détient LA clé, absolue du «juste» prix d’acquisition. Pourquoi? Car il ne s’agit justement pas uniquement du prix.
Bien évidemment, personnellement, je pars toujours de ces grands principes pour avoir une première fourchette de prix et ainsi valider avec le.la vendeur.euse si le rapprochement est faisable ou pas. Car rien ne sert de perdre du temps si l’on est trop éloigné en termes de valorisation. Mais cela n’est qu’un ingrédient de la réussite du projet.
Au-delà des formules classiques
Afin de m’assurer des tendances du marché, je me renseigne toujours auprès de fiduciaires, banques ou encore de personnes qui ont déjà vendu leur société dans le secteur qui m’intéresse. Tenir compte de l’expérience. Des autres, mais aussi celle personnelle. Au fur et à mesure des années, on prend «de la bouteille» et on arrive ainsi plus rapidement à évaluer la valeur d’une entreprise dans un secteur que l’on connaît et où l’on a déjà pratiqué quelques acquisitions.
Visualisation à large échelle
Une fois la fourchette de prix validée, je pratique toujours le même process: j’essaye de réaliser des budgets des sociétés réunies sur les prochaines années, afin de visualiser les bénéfices que pourrait m’apporter ce rapprochement. Il est important de bien identifier les gains possibles sur les charges et les revenus (synergies), mais aussi prendre en compte le dynamisme et l’ambiance de l’équipe nouvellement créée par ce rapprochement. Ne soyez pas surpris, comme le dit le proverbe «on surestime souvent les gains à 1 an, mais on les sous- estime à 5 ans». Cet exercice vous forcera à poser les bonnes questions au/ à la vendeur.euse et de poser les bases de l’intégration avant même l’achat. Car vous pouvez avoir une entreprise avec un super résultat, qui vaut selon les calculs beaucoup d’argent, mais qui dans votre environnement ne sera pas du tout à sa place, et ce pour différentes raisons: cultures d’entreprise très différentes, processus managériaux éloignés, business model difficile à «fusionner», etc.
Pour vous donner un exemple, lorsque j’étais chez Qualibroker, nous privilégions toujours l’acquisition de sociétés rentables, et donc chères, mais souvent l’activité ne reposait que sur une ou deux personnes. Le risque? Qu’en cas d’acquisition, sans ces deux piliers humains, les résultats diminuent dans le temps.
Mais attention, en business, rien n’est immuable! Une structure sur le papier peu efficace peut réaliser son potentiel dans un nouvel environnement et devenir un super atout pour votre projet d’entreprise.
Écrire bien en amont l’histoire de l’avenir du/de la CEO
Dans le cadre d’acquisition de PME, je suis toujours surpris de l’énergie qui est prise par les parties pour négocier le dernier petit montant, par principe. Il ne faut pas oublier que dans beaucoup de cas, le/la vendeur.euse sera toujours partie prenante dans l’affaire une fois l’acquisition faite, et aura donc une capacité de nuisance très forte si la relation est tendue.
Le destin que l’on dessine pour le/la futur.e ex-CEO est directement connecté au prix de vente. S’agit-il de lui payer un salaire post-acquisition? De lui verser un loyer s’il/elle reste propriétaire des murs? De le/la garder au conseil d’administration, et pour combien de temps? Autant de «coûts» cachés, très souvent non anticipés, qui doivent peser dans la balance de la fixation du prix d’achat. En sachant cela, il faut plutôt essayer de ne pas (trop) tirer sur la corde et de comprendre les objectifs de la personne que vous avez en face de vous. Et vous verrez que tout se passera (beaucoup) mieux ensuite.
Conclusion
J’aime dire que je vois le prix en fonction du futur, et non du passé ou du présent. Or, les valorisations avec des calculs se font toujours sur le passé. «Disrupter» ce modèle peut être intéressant, et réserver de belles surprises!